Je parle ici en tant que citoyen d’un petit pays membre de l’Union Européenne.
En face du drame du Brexit, et toutes les difficultés qui suivent le Brexit pour mon pays, j’ai ressenti une énorme solidarité de la part de nos partenaires européens, notamment de la part de la France.
Parfois, les habitants de petits pays pensent qu’ils pourraient être engloutis s’ils adhéraient à des grosses organisations comme l ‘UE. Mais ce n’était pas le cas dans l’UE. L’exemple du Brexit montre que c’est vrai. Il montre que l’EU est une Union des nations et des peuples, petits et grands, une Union dans laquelle les petits Etats sont protégés et respectés.
Nous (Irlandais) regrettons que le Royaume Uni quitte l’UE. Le Royaume Uni et L’Irlande ont rejoint l’UE le même jour (le 1er janvier 1973) .
Nous avons trouvé que L’UE a toujours été un lieu de dialogue sans complexe avec tous nos voisins, mais en particulier avec le Grande Bretagne.
Les relations bilatérales entre des états, qui ne sont pas de la même taille, peuvent devenir difficiles. Quand les mêmes états sont membres d’une organisation qui est plus grande que les deux, les difficultés diminuent.
I’UE est un lieu de réunions occasionnelles entre ministres, entre fonctionnaires, et entre des organisations professionnelles, ou ils peuvent développer sympathie mutuelle, ou ils peuvent anticiper les problèmes futurs, ou ils peuvent promouvoir un sens de solidarité. Je regrette que le Grande Bretagne soit en train de perdre ces avantages.
Je crois que l’appartenance commune à l’UE, de l’Irlande et le Royaume Uni a ouvert la possibilité de faire un accord, comme l’Accord du Vendredi Saint d’avril 1998, entre nos deux pays. Des événements comme celui-là, seraient plus difficiles dans le futur.
Les bénéfices de notre adhésion à L’UE ont été ressentis de façon concrète par des citoyens qui vivent le long de la frontière, entre L’Irlande et L’Irlande du Nord, longue de plus de 480 km et traversée par plus de 200 routes, actuellement ouvertes et invisibles. Cette frontière invisible est d’abord et avant tout une réussite de l’adhésion du Royaume Uni et de l’Irlande au Marché Commun de L’UE, en combinaison avec le processus de Paix en Irlande du Nord.
Ce processus de Paix repose sur l’Accord du Vendredi Saint de 1998, qui a mis fin à plus de trente ans de terrorisme entre les deux communautés en Irlande du Nord, et entre les soi-disants « républicains » et « loyalistes ».
L’idée fondamentale de l’Accord du Vendredi Saint est très ambitieuse et très difficile. Il est de permettre la coexistence des deux identités, et des deux allégeances nationales, dans le même espace géographique…l’allégeance irlandaise et l’allégeance britannique.
Les structures de l’Accord envisagent, à la fois, des liens étroits entre l’Irlande du Nord et le Grande Bretagne avec des liens étroits entre l’Irlande du Nord et l’Irlande.
L’Accord cherche à éviter l’isolement de l’une ou de l’autre communauté en Irlande du Nord de leur foyer de loyauté.
Il cherche de rendre confortable les unionistes et les nationalistes, à la fois, et pour toujours. Il démontre un esprit d’Etat, imaginatif et ambitieux. Il est menacé fondamentalement par le Brexit.
La suppression des infrastructures frontalières fut partie intégrante du processus de paix et de réconciliation, qui se poursuit.
Mais il a été aussi partie intégrante de la création du marché unique de l’UE.
Les deux processus renforçaient les uns les autres.
Des citoyens traversent la frontière chaque jour librement pour travailler, étudier, rendre visite à leur famille ou pour accéder à des services de santé. Cette mobilité facilite les bonnes relations et la réconciliation entre les communautés sur l’ensemble de l’ile.
Depuis que Le Royaume Uni a voté pour le Brexit, le gouvernement irlandais a placé la protection de cette paix au cœur de son approche. I’UE s’y est également engagée et nous sommes reconnaissants du soutien de la France et de nos partenaires européens.
L’accord de retrait, finalisé en Octobre 2019 et approuvé par les parlements européens et britanniques, contient un protocole sur L’Irlande qui est le résultat d’une négociation détaillée entre l’UE et le Royaume Uni. Du côté du Royaume Uni le négociateur en chef fut Boris Johnson.
Par l’Article 5 de ce protocole, le Royaume Uni accepte que les recouvrement des taxes douanières auraient lieu entre le Grande Bretagne et l’Irlande du Nord, et pas sur la frontière entre l’Irlande du Nord et L’Irlande, si les biens sont destinés à l’Irlande en tant que membre de l’UE.
Cela est très clair.
C’est écrit en toutes lettres dans un Traité international, approuvé par la Chambre des Communes.
Après tout cela, ces derniers jours, le gouvernement britannique tente de nier cet aspect contraignant du traité.
Il est difficile de discerner la motivation du gouvernement britannique.
Peut être veut il que les négociations du libre échange s’effondrent ?
Peut être voit il un avantage politique dans une rupture totale avec l’UE pour mieux mobiliser les électeurs nationalistes en Angleterre ?
Ou peut être est ce un outil de négociation, pour gagner autre chose, peut être l’accès au marché financier de l’UE ? Mais la bonne foi est nécessaire pour une négociation productive. En tentant de nier le contenu de l’Accord du Retrait, le Royaume Uni sacrifie la bonne foi.
En plus d’avoir des répercussions sur le processus de paix, le Brexit aura également un impact important sur le commerce et l’économie de l’Irlande. L’Irlande est une des économies les plus ouvertes du monde.
Bien que nous ayons réussi à diversifier les exportations de biens et services vers les autres marchés, un grand nombre de nos exportations des biens et services est destiné au Royaume Uni. De plus, ces exportations proviennent des secteurs locaux et des régions défavorisées de notre pays. Le Brexit accentuera les difficultés internes. Le secteur agricole sera particulièrement touché par le Brexit. Près de la moitié de nos exportations alimentaires est destinée à la Grande Bretagne ou à L’Irlande du Nord.
Nous dépendons aussi beaucoup du Royaume Uni pour nos importations….près d’un quart de nos importations.
Nous dépendons aussi du Royaume Uni pour le transport de nos exportations via le Royaume Uni qui est notre pont terrestre vers les autres marchés de l’Europe.
Tout ca explique pourquoi l’Irlande veut un accord profond de libre échange entre l‘UE et le Royaume Uni, et pourquoi nous sommes disproportionnellement troublés par la possibilité d’un échec des négociations.
Pour les mêmes raisons, nous voulons aussi une compétition loyale entre le Royaume Uni et l’UE.
Nous voulons protéger l’intégrité du marché unique de l’UE.
Si la frontière terrestre entre L’Irlande et L’Irlande du Nord reste ouverte, comme convenue entre le Royaume Uni et l’UE, il sera essentiel que le Royaume Uni respecte son accord avec l’UE dans le protocole sur l’Irlande.
J’ai parlé des problèmes de l’Irlande et du Brexit. Je dois dire quelques mots au sujet de l’Europe.
Nous avons des défis sérieux.
Le budget de l’UE est trop petit pour surmonter les problèmes de sécurité, de recherche, de l’innovation, de l’agriculture, des refugieé, et de la solidarité entre les régions riches et les régions pauvres.
Nous devons créer un esprit de solidarité entre les peuples de l’UE, une espèce de patriotisme européen.
Mais l’UE reste sur des valeurs comme la primauté du droit et du pluralisme politique.
Nous avons énormément de choses à faire pour garder notre maison en paix en Europe.